« Notre route était tracée dans le ciel… En marchant, nous avons appris le chemin. »Tels sont ces « Trois Rois », des entraîneurs, leur marche ne s’arrête pas, ils ont vu une lueur et n’ont plus de temps à perdre… C’est le début de cette aventure irrésistible, celle que met en scène l’auteur, Gianfranco Tuveri, Grand carme italien, installé au Couvent Notre-Dame-des-Lumières à Nantes. Une pièce de théâtre en 3 actes, inspirée par les reliques des Mages, vénérées dans la cathédrale de Cologne, et qui ont donné lieu à un pèlerinage. En effet ,à partir du XXIIIe s, Cologne est devenue la 4è ville sainte du christianisme aux côtés de Jérusalem, Rome et Constantinople. Des Mages, cités une seule fois dans l’évangile de Matthieu et dont on sait très peu de choses. C’est leur épaisseur qui vient prendre forme dans cette œuvre, leur espérance. « Nous avons tout quitté, tourné le dos à notre passé… »
Petit à petit, nous ajustons notre pas à celui de ces fougueux aventuriers dont la parole est de feu. Les serviteurs, les conseillers, Hérode, sont là : chœur des défaitistes, des complotistes… Des poids qui alourdissent leur marche… Des voix insidieuses : « Pauvres naïfs ! Le monde que vous cherchez d’ici seulement naît, et non des étoiles ! »Au nom de Bethléem : rire et dérision… « Leurs ténèbres sont tellement épaisses qu’elles nous ont ôté la lumière de l’Astre »se disent les Mages. Ils rencontrent les bergers… « Un beau rêve dont il ne reste qu’un doux souvenir…Ce n’est pas un roi qui est né, mais un pauvre enfant, dans les ruines de la maison de David .» Mais les Mages ne se laissent pas décourager : « Nous ne sommes qu’attente… Seuls les yeux de ceux qui ont marché, éclairés par l’Astre divin pourront le reconnaître… » Et voilà que Joseph sort à leur rencontre : « Soyez les bienvenus, Seigneurs ! » On croit entendre Abraham aux chênes de Mambré. Et puis Marie raconte, la visite de l’ange, relecture et partage…Réaction de Joseph qui se fait dialogue avec Marie : « Entre nous, il y avait Quelqu’un. » Et les Mages accueillent le récit : « Vous nous parlez d’une vie divine, à présent nous sommes transformés. En paix, nous pouvons retourner vers nos maisons… Au lointain, cette annonce doit arriver… »Et Joseph de leur donner du pain pour la route.Un retour angoissant pour Melchior, âgé et fatigué, tourmenté par la mort. Entouré par ses frères, ceux-ci le rassurent : « Garde la lumière, elle est inscrite dans ton cœur, nous sommes avec toi… » Comme une première Eglise, ce trio… Melchior, en écho à Marie, meurt en prononçant : « Oui , me voici !» L’aventure n’est pas terminée, ils retrouvent le monde défiguré d’Hérode. Dalila leur annonce le massacre des enfants.Un voyage qui est un cheminement dans les ombres et les lumières de la vie où les questions de sens se posent « demandes et réponses marchent ensemble », où le doute pointe aussi. Face à la mort surtout…Gaspard est rentré, seul, il va mourir… Mais voilà Thomas et la Bonne Nouvelle !Un texte fait pour la mise en scène…fait pour susciter une réflexion sur le Mystère de la foi chrétienne, les grandes questions de la vie et de la mort, le sens de l’existence. Il donne chair à ses chercheurs…’Prêtres, Prophètes et Rois’.
« Les Trois Rois »,Gianfranco Tuveri, Nantes novembre 2022