Des lumières dans la nuit de la Shoah

L’inauguration de l’exposition « Du cri du cœur à la voix des Justes » s’est déroulée jeudi soir 1^er décembre à la Maison Saint-Clair en présence de notre évêque Mgr Percerou qui a accueilli pour l’occasion les membres de la communauté juive de Nantes : M. Patrick Lalou son président, M. le Rabbin Ariel Ben David, M. Alain Beven-Bunford président de la Licra 44 ainsi que plusieurs membres juifs du Centre culturel André Neher et de l’Amitié judéo-chrétienne. Étaient également présents plusieurs prêtres et représentants des services diocésains ainsi que M. le Pasteur Pierrot Munch.

Nathalie Kromwell responsable du Service diocésain pour les relations avec le Judaïsme (SDRJ) a introduit la rencontre en souhaitant la bienvenue aux quarante personnes invitées…

Nathalie a rappelé brièvement l’origine de cette exposition conçue par le Service national des relations avec le Judaïsme (SNRJ) à la demande de Mgr Eric de Moulins Beaufort président de la Conférence des évêques de France ; exposition réalisée en partenariat avec le Comité français Yad Vashem en lien avec le Mémorial de la Shoah de Paris.

C’est le Père Christophe Le Sourt, directeur du SNRJ et son assistante Cécile Déprez, qui ont commenté le sens et les objectifs de cette exposition itinérante, composée de 18 panneaux, vouée à se déplacer en France dans les diocèses, les écoles, les mairies…

Le projet d’exposition s’inscrit dans les démarches de l’épiscopat français qui, depuis la déclaration de repentance de Drancy en 1997, s’engage résolument dans le rapprochement avec les juifs et le Judaïsme. La récente déclaration des évêques de France du 1^er février 2021 à la CEF, intitulée « Lutter ensemble contre l’antisémitisme et l’antijudaïsme [religieux] sera la pierre de touche de toute fraternité réelle » (lire des extraits) marque le point de départ de réflexions menées avec le Grand Rabbin de France (lire sa déclaration) sur l’attitude de l’Église face à la persécution des juifs pendant la Shoah. L’année 2022, année mémorielle des 80 ans de la sinistre conférence de Wannsee (décision nazie de la mise en œuvre de la Solution finale le 24 février 1942) et de la rafle du Vel d’Hiv (à Paris les 16 et 17 juillet 1942) a vu à la CEF, au Collège des Bernardins, au Mémorial de la Shoah ainsi qu’au Panthéon, nombre de rencontres commémoratives et de journées d’étude sur ces événements tragiques.  De là, a été mise en lumière la lettre de protestation de Mgr Saliège contre le traitement inhumain infligé aux juifs, ayant fait dire au célèbre avocat Serge Klarsfeld que les juifs avaient dès lors une « dette immense envers l’Eglise ». A l’initiative du Grand Rabbin Haïm Korsia, cette lettre pastorale a été lue dans toutes les synagogues de France le 16 juillet ; elle le fut pareillement dans les Eglises le 15 août 2022.

L’exposition comporte tout à la fois une dimension historique et éducative. Elle fait mémoire de la persécution des juifs durant la Seconde guerre mondiale, dans le silence accablant de la plupart des institutions, y compris religieuses, notamment lors de la parution des lois antijuives en 1940 et 1941. Mais l’exposition vise surtout à rendre hommage aux exceptionnels actes de courage de personnes reconnues Juste parmi les nations ayant sauvé des juifs au péril de leur vie ; c’est la mission poursuivie par l’Institut Yad Vashem décrite sur plusieurs panneaux.

Le panneau sur l’acte de repentance de Drancy introduit le parcours. La demande de pardon des 16 évêques dont le diocèse comprenait des camps d’internement, antichambres de la déportation, a été, pour cette exposition, le préalable à la mise à l’honneur de ces chrétiens laïcs ou religieux.

A ce propos, Mgr Percerou a tenu à étendre l’hommage adressé aux chrétiens reconnus Justes, à tous ces anonymes croyants ou non croyants qui, par simple humanité, ont choisi de faire le bien dans un contexte de grands dangers en sauvant des juifs, hommes, femmes ou enfants.

Les lettres de Mgr Saliège et des autres évêques tel Mgr Gerlier, parues après l’été 1942, ont déclenché un réveil des consciences ainsi que le déploiement de filières de sauvetage des familles juives liées aux nombreux réseaux de résistance à l’occupant nazi.

Enfin, l’exposition montre l’exemple de femmes religieuses et non religieuses associées à ces actions héroïques, telle Marie-Rose Gineste qui a distribué la lettre de Mgr Théas dans toutes les églises du diocèse de Montauban, affirmant « n’avoir fait que ce qu’elle avait à faire, sans plus ».

Le cri d’indignation de ces Justes, cri du cœur, a permis la dénonciation du mal absolu lorsque la dignité humaine était bafouée. La voix des Justes, de ceux et celles qui ont eu le courage de se faire entendre et d’agir, nous rappelle qu’en toutes circonstances l’humain peut sauver l’humain par une simple parole : « Les juifs sont des hommes, les juives sont des femmes… »

Thierry Colombié

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