Du 8 au 15 juillet, 87 volontaires de la Délégation Catholique pour la Coopération sont réunis au lycée de la Joliverie, à Saint-Sébastien-sur-Loire, pour vivre le « stage partir », ultime étape de préparation avant leur départ en volontariat dans 25 pays différents. Parmi eux, cinq jeunes sont originaires ou actuellement en Loire-Atlantique. Leur rencontre est l’occasion d’en savoir plus sur cette expérience peu commune.
Rémi Grégoire, responsable du service recrutement et formation, pilote ce stage : Il intervient au terme d’un processus qui comprend plusieurs étapes. Les candidats, pour la grande majorité, entendent parler de la DCC par le bouche-à-oreille, à la faveur d’un témoignage de retour de mission ou de parents ou amis qui ont eux-mêmes vécu l’expérience, d’autres découvrent la proposition lors de recherches sur Internet ou au sein de leur paroisse. Ils sont d’abord invités à participer à une « session choisir ». Trois jours de présentation qui permettent au candidat, comme à la DCC de déterminer si un départ est possible, dans le cadre du Volontariat de Solidarité Internationale (VSI, de 1 à 2 ans, sous contrat d’État) ou du Volontariat Mission Solidaire (de 3 à 6 mois).
« J’ai décliné une première proposition de mission car je ne me sentais pas légitime. »
Cette première rencontre est l’occasion pour chacun de préciser son projet et d’indiquer des souhaits : en termes de limite géographique, de vie en communauté, d’implication dans la vie d’une communauté chrétienne locale, de développement de compétences professionnelles antérieures… Ensuite l’équipe de la DCC réalise le délicat travail de mise en adéquation de ces souhaits avec les besoins exprimés par les partenaires (diocèse, congrégations religieuses, associations non cultuelles…). L’affectation intervient alors et crée parfois la surprise : Philippe, en fin de premier cycle au séminaire saint Jean de Nantes explique qu’il a dû refuser la première affectation qui l’aurait conduit à enseigner la philosophie à des séminaristes. « Je ne me sentais pas légitime de faire cours alors que je suis moi-même au séminaire. J’ai accepté la seconde proposition qui était d’assurer la rédaction en chef de radio Maria, pour le diocèse de Man en Côte-d’Ivoire. J’écoute beaucoup la radio, je vais avoir à recenser les émissions et envisager celles qu’il faudrait développer… Pour cela je viens de passer trois jours à Radio Fidélité, et je cerne mieux le sujet ».
« J’ai besoin de cette expérience pour poursuivre mon cheminement vers le sacerdoce. »
Un autre séminariste de Nantes, Grégoire, va vivre cette expérience dans le cadre du stage de fin de 1er cycle en s’envolant pour une mission à Madagascar : » J’y avais pensé il y a déjà quelques temps et les pères du séminaire m’ont dit que c’était une bonne idée de vivre cette expérience maintenant. Je pense que j’en ai besoin pour poursuivre mon cheminement. J’attends d’être chamboulé par cette autre réalité de la vie de l’Eglise. J’aurai une mission de plantation d’arbres et de sensibilisation dans les écoles et les paroisses du diocèse d’Antsiranana ». Grégoire y œuvrera à la reforestation des forêts malgaches dont la superficie n’a cessé de diminuer ces dernières décennies.
« J’avais le souhait de partir et de vivre une expérience de lâcher-prise. »
Pauline a grandi à Rezé où ses parents résident toujours, elle travaille à présent à Paris et s’apprête à partir pour l’Ecole Spéciale de Brazzaville (Congo), gérée par les Filles de la Charité de Saint-Vincent de Paul, qui accueille des jeunes en situation de handicap, de jeunes adultes analphabètes et des orphelins. « Après avoir terminé mes études, j’avais le souhait de partir et de vivre une expérience de rencontres et de lâcher-prise. Je souhaite découvrir une autre culture, même si je sais que chaque individu sera différent ». Là-bas elle sera gestionnaire financier, même si ce n’est pas le cœur de sa formation cela a du sens dans son parcours et pourra devenir un atout pour de futurs engagements dans le milieu associatif.
« Ça fait sens pour moi d’aller rencontrer ces femmes dans leur pays d’origine, car ici je suis témoin de leurs souffrances et de leurs grandes difficultés. »
Lors de ce stage d’une semaine les volontaires se croisent et font connaissance, par région du globe dès que c’est possible, mais tous ont envie d’en savoir plus sur les raisons qui poussent chacun à se lancer dans l’aventure… Orlane, elle, a d’abord trouvé l’association dans laquelle elle souhaitait s’investir et a entamé le parcours avec la DCC parce que c’était le support de « Claire-Amitié » pour l’accueil de volontaires. « Claire Amitié Internationale » a pour ambition de conduire des jeunes femmes jusqu’à des formations professionnalisantes, gage de leur autonomie, pour qu’elles puissent prendre toute leur place dans la société de leur pays. Originaire de Nort-sur-Erdre, Orlane est psychologue en région parisienne auprès de femmes d’origine africaine en situation de grande précarité. « Ça fait sens pour moi d’aller les rencontrer dans leur pays d’origine, car ici je suis témoin de leurs souffrances et de leurs grandes difficultés. Il y a quelques temps je suis déjà partie un mois au Togo et j’avais le désir de revivre cette expérience sur une plus longue durée ». Orlane sera assistante de formation au sein d’un foyer Claire Amitié, elle sait que là où elle exercera son métier de psychologue il ne sera pas envisagé de la même façon qu’en France « je sais qu’il faudra plutôt être « couteau-suisse » pour épauler la directrice du foyer à faire les papiers et envisager des propositions adaptées. On m’a déjà dit que ce foyer était dépositaire de beaucoup de traumas et que l’équipe ne savaient pas quoi en faire. » La jeune femme qui n’est pas croyante a demandé à ne pas résider sur son lieu de travail. « Je serai heureuse d’avoir mon indépendance, je n’aurais pas été très à l’aise d’habiter sur mon lieu de travail, avec le reste de l’équipe de confession catholique, mais mon objectif est de respecter l’autre dans ses croyances, d’ailleurs la foi, la prière et la communauté sont de grandes ressources pour mes patientes. La psychologie ne remet pas en cause la religion, elle est là pour l’être humain en général ».
« Je sens que là-bas aussi au-delà de mon utilité qui sera toute relative, ma présence sera bonne. »
Claire-Marie, enfin, a déjà vécu la mission, ici à Nantes, puisqu’elle achève une année de vie en colocation « Marthe et Marie » avec des jeunes mamans en difficulté : « J’ai choisi de partir avec Miséricordia dans les favelas de Buenos Aires en Argentine, pour animer le quotidien des jeunes du quartier et vivre une vie de prière communautaire. Je viens de terminer mes études d’orthophonie et je souhaite faire cette expérience, pour moi-même. A « Marthe et Marie » j’ai vécu la joie profonde de me sentir à la bonne place, je sens que là-bas aussi au-delà de mon utilité qui sera toute relative, ma présence sera bonne. Je prends cet engagement comme un moyen d’apprendre un peu plus à vivre l’Évangile, et je me dis que couper de mes amis et de mes proches par la distance, mon quotidien me portera vers la sainteté. Ce sera d’ailleurs peut-être plus facile que dans la vie active qui m’attend ensuite… »
Ce sont de très beaux témoignages de générosité et d’engagement que donnent ces 5 jeunes, qui comme tous les autres partiront en mission d’ici trois mois. Parmi les autres stagiaires de cette semaine il y a quelques familles avec enfants et des volontaires de tous âges (de 21 ans pour la benjamine, jusqu’à 70 ans pour le plus sage). Avant le départ, la DCC les sensibilise à l’insertion et l’intégration locale, l’adéquation au poste, les contextes, la santé du volontaire et les questions d’abus, des outils de gestion de conflits et même « l’Eglise comment ça marche ? » car, si ici en France la foi est de l’ordre de l’intime, dans les pays où s’acheminent ces volontaires, la foi se vit de manières très différentes, il est même parfois inenvisageable de ne pas avoir de religion.
Au terme de la mission, les volontaires vivent une dernière rencontre la « session revenir », qui dure deux jours et demi. Celle-ci permet un bon débriefing, donne la joie profonde d’échanger entre pairs sur les aventures vécues en mission et de tourner une belle page du livre de sa vie, pour souvent prendre un virage professionnel ou intérieur. Rémi Grégoire témoigne « Une mission a parfois des résonances un an, dix ans ou trente ans plus tard. Beaucoup se réorientent ensuite dans le domaine de l’éducation ou avec une visée du bien commun très évidente. Quelque chose s’enclenche au moment du volontariat, c’est évident ! » Signe de la richesse de l’expérience : les anciens sont très nombreux à participer à toutes les étapes de ce processus et assurent les liens avec les partenaires à l’étranger… Une manière de poursuivre la mission.
Samedi prochain, Monseigneur Francis Bestion, évêque de Tulles et accompagnateur de la DCC présidera la messe d’envoi des volontaires en présence de leur famille. Tous auront rejoins leur lieu de mission d’ici trois mois.
Isabelle Nagard