Les grands quartiers populaires de Nantes et de son agglomération étaient représentés par des acteurs associatifs ou paroissiaux, des habitants, des chrétiens, lors de la soirée organisée le 22 mars 2019 par la Mission ouvrière et le Comité vigilance et solidarité. L’occasion de reconsidérer quelques idées reçues sur ces réalités.
Un apport captivant a été fait par Hervé Guéry, spécialiste de l’observation des territoires au bureau d’études Le Compas. Il parle d’abord d’« effet quartier » : sur l’image, l’absence de mixité sociale, le manque de réseaux pour accéder à l’information, aux droits ou à l’emploi, par exemple. Il épingle quelques indicateurs significatifs. Dans les cités populaires, la moitié des revenus se situe en dessous du seuil de pauvreté (1000 € pour une personne seule, 1500 € pour un couple), les enfants étant les principales victimes de cette pauvreté. Il y est difficile d’atteindre l’emploi quand deux tiers des offres ne passent pas par Pôle Emploi, et lorsqu’on ne possède pas de voiture. Pourtant, 63 % des revenus d’activité des habitants sont issus de leur travail tandis que 20 % seulement proviennent des prestations sociales. Quant aux jeunes sans diplôme ni formation ni emploi, ils sont environ 17 %, contre 4,5 % au niveau de Nantes métropole.
L’intervenant précise la problématique des déplacements : « Les emplois plus facilement accessibles aux habitants, souvent peu formés, nécessitent une forte mobilité d’un lieu de travail à un autre : ménages, manutention, aide à domicile, sécurité, etc. Beaucoup sont des emplois précaires ». De cela ressort la nécessité, dans ces quartiers relevant de la « politique de la ville », d’un effort particulier sur la petite-enfance et la réussite éducative des enfants. Pour lui, « il faut également cibler les liens à l’emploi qui sont essentiels au développement des quartiers, et donner une place importante aux associations et aux acteurs des quartiers ».
Recul de la mixité sociale
À une question de la salle sur la réalité d’une économie parallèle ou cachée (trafics divers, travail au noir), les données montrent qu’« il ne faut pas la surestimer même si elle pollue le territoire, ceux qui en profitent habitant en dehors de ces quartiers ! » Certains remarquent un autre phénomène : la réhabilitation des logements et les reconstructions qui font augmenter les loyers, ainsi que les dispositifs réglementaires qui empêchent de plus en plus les gens aux revenus moyens d’accéder aux HLM. Le résultat est un recul de la mixité de population et l’accroissement d’un processus de « ghetto » social.
L’intervention d’Aziz Zaouat, ancien éducateur, notamment au Sillon de Bretagne, vient enrichir le débat. Son rôle : faire du lien avec toutes les générations et communautés, tout en croisant les catholiques qui y vivent. « C’est grâce à La Pause, le lieu d’accueil de la paroisse, que j’ai rencontré les femmes du quartier », se souvient-il. Vis-à-vis des enfants et des jeunes, il souligne l’importance d’établir la confiance et de leur apprendre à distinguer le bien du mal.
Cette soirée n’était qu’une étape. La réflexion va se poursuivre lors d’une prochaine rencontre, le mardi 4 juin 2019 à 20 h à la Maison diocésaine Saint-Clair. Sous le titre « Vivre et espérer en quartier populaire, une réalité à partager », il s’agira cette fois d’un échange d’expériences et de perspectives à se donner pour témoigner d’un message d’espérance.
Benoît Noblet
ELA n° 93 – mai 2019
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