Frères et sœurs,

Au retour de l’Assemblée plénière de Lourdes, j’aurais aimé vous partager des informations enthousiasmantes sur la « conversion missionnaire des diocèses » ou sur « le chemin de transformation de la Conférence des Évêques, afin qu’elle soit plus synodale et davantage au service des diocèses et de leur mission » … Deux points, parmi d’autres, qui étaient au programme de cette Assemblée avant que n’éclate, quelques jours avant son ouverture, ce qu’il est convenu d’appeler « l’affaire Santier » et que, pendant celle-ci, nous soit communiqué le courrier du cardinal Ricard dans lequel il reconnait « des actes répréhensibles, il y a 35 ans, sur une jeune fille de 14 ans ». Ces révélations ont conduit le président de la Conférence à rendre public des situations similaires qui concernent des évêques qui ne sont plus en fonction et qui ont toutes fait l’objet d’un traitement judiciaire. Je ne reviendrai pas ici sur ces affaires et sur les résolutions que nous, les évêques, avons prises. Vous trouverez toutes les informations nécessaires sur le site internet du diocèse et sur celui de la Conférence des Évêques de France.

Je voudrais davantage me faire l’écho des très nombreux messages reçus qui expriment colère et déception, qui s’interrogent sur la sincérité des évêques qui, il y a un an, ont pris des engagements forts pour faire de notre Église une « maison sûre » et dont on découvre aujourd’hui la trahison de quelques-uns d’entre eux. Ces messages pointent, à juste titre, des dysfonctionnements et des erreurs qui ont conduit à ce qu’il faut bien qualifier de désastre. Je sais que les rédacteurs de ces messages sont les porte-parole de bon nombre de catholiques, mais également de beaucoup d’autres qui ne partagent pas nécessairement notre foi.

Cette colère, ce sentiment de trahison, habitaient le cœur des évêques à Lourdes et nous avons pu l’exprimer clairement, tout comme nous avons aussi clairement exprimé la nécessité d’aller encore plus loin dans la lutte contre les abus, de faire en sorte qu’il n’y ait pas de traitement de faveur pour les évêques, de clarifier les procédures, d’accueillir les exigences de vérité qui s’expriment dans le Peuple de Dieu et de lui faire confiance quand il demande à être informé de ces situations, quand il se dit disponible pour porter avec ses pasteurs tout à la fois le poids de ces affaires douloureuses et leur résolution.

Beaucoup de ces messages, tout en exprimant colère et déception, témoignent de la part de leur rédacteur, d’un authentique amour de l’Église, du désir de contribuer à la rendre plus fidèle à l’Évangile et de mettre en son cœur le service des personnes fragiles, tout particulièrement les victimes d’abus sexuels. Alors je voudrais vous exprimer ma gratitude ! Cela dit combien est grande la foi des baptisés en Jésus-Sauveur, combien est fort leur attachement à leur Église porteuse d’une mission si grande : porter le Salut au monde, mais pourtant composée de femmes et d’hommes si pauvres et fragiles, si pécheurs… C’est tous ensemble que nous travaillerons à « réparer » notre Église et je mesure aujourd’hui d’une manière particulièrement vive combien, nous autres ses pasteurs, nous avons besoin plus que jamais de l’engagement de tous.

« Dans la joie que donne l’Esprit », c’est le titre de la Lettre Pastorale que je vous ai adressée le jour de la Toussaint. La joie, la vraie, jaillit toujours de l’épreuve surmontée, de l’engagement résolu pour une juste cause et contre tout ce qui fait du mal à l’homme et à la Création, du don de soi pour que la vie soit respectée, le frère et la sœur restaurés dans leur humanité. C’est cette joie-là qui a éclaté au matin de Pâques et que nous avons, tous ensemble, en peuple de frères et sœurs, à faire triompher. Alors, si en ces jours, avec Jésus, nous portons la croix, soyons assurés que notre engagement au service d’une Église servante et humble, respectueuse de tous ces « petits » qui sont les privilégiés de Dieu, nous apportera cette joie que donne l’Esprit et l’apportera à toutes celles et ceux qui attendent que nous soyons à la hauteur de la Bonne Nouvelle que nous annonçons.

« Dans la joie que donne l’Esprit… », soyez tous assurés de ma prière fraternelle et de ma détermination sans faille à « réparer notre Église », et à la « réparer » avec vous…

Fraternellement dans le Seigneur,

 

+ Laurent Percerou
Évêque de Nantes