(©photo : CEF)

Lourdes le 8 novembre 2022 : Discours de clôture de l’Assemblée plénière

Chers frères et sœurs,

Réunis en Assemblée plénière à Lourdes, nous avons entendu la stupéfaction, la colère, la tristesse, le découragement suscités par ce que nous apprenons au sujet de Mgr Michel Santier, ancien évêque de Luçon puis de Créteil, et maintenant au sujet de Mgr Jean-Pierre Ricard, ancien archevêque de Montpellier puis de Bordeaux.

Nous sommes conscients que ces révélations affectent douloureusement les personnes victimes, en particulier celles qui avaient choisi de nous faire confiance. Nous constatons l’ébranlement de nombreux fidèles, de prêtres, de diacres, de personnes consacrées. Ces sentiments sont également les nôtres. Membres d’un même corps ecclésial, nous sommes nous aussi blessés, atteints en profondeur.

Dans le cas de Michel Santier, nous avons vivement conscience des responsabilités qui nous reviennent et nous avons travaillé pendant notre Assemblée à identifier les dysfonctionnements et les erreurs qui ont mené à une situation choquante pour tous.

Certains ont pu se demander si le droit de l’Église n’organisait pas une forme d’impunité ou de traitement particulier des évêques. Ils pensent, à juste titre, que la responsabilité épiscopale renforce chez ceux qui l’exercent le devoir de droiture et la légitime exigence des fidèles comme de l’institution ecclésiale. Nous le redisons avec force : il n’y a pas, et il ne peut pas y avoir, d’impunité des évêques.

En raison même de la nature de leur charge apostolique, les évêques dépendent directement du Saint-Siège. Les procédures qui les concernent sont plus complexes et prennent davantage de temps. Nous nous engageons à travailler avec le Saint-Siège aux clarifications et aux simplifications qui s’imposent. Nous avons décidé de mettre en place un Conseil de suivi qui nous permettra de ne pas affronter seuls et entre nous ces situations.

Certains s’interrogent : dans les circonstances présentes, quel crédit donner aux engagements pris il y a un an pour tirer les conséquences du rapport de la CIASE ? Nous pouvons en donner l’assurance : une transformation des pratiques est bel et bien en cours, avec l’aide de nombreux fidèles laïcs particulièrement qualifiés, dont des personnes victimes. Des décisions sont déjà prises et mises en œuvre. Diocèses et mouvements d’Église s’impliquent de manière plus construite dans la protection des mineurs. Les groupes de travail décidés il y a un an rendront leurs conclusions en mars 2023. Nous venons de faire un point d’étape avec eux au cours de cette Assemblée. Ce travail de fond commence à porter du fruit. Nous continuerons sur cette lancée.

Une autre question habitait nos cœurs au début de l’Assemblée plénière : y a-t-il, y aura-t-il d’autres affaires de ce genre ? La condition humaine étant ce qu’elle est, nul n’est à l’abri de fautes graves et dramatiques. Mais nous pouvons et nous voulons renforcer dans l’Église les processus qui les limitent au maximum et les traitent adéquatement quand elles surviennent.

Dans ce contexte, le communiqué du Cardinal Jean-Pierre Ricard nous a tous bouleversés. Son initiative de révéler lui-même un fait grave de son passé est importante. Nous avons mentionné l’ensemble des situations que nous connaissons. Elles concernent des évêques qui ne sont plus en fonction. Elles ont toutes fait l’objet d’un traitement judiciaire.

Frères et sœurs, humblement mais de tout cœur, nous continuons le travail entrepris pour que l’Église soit une maison plus sûre. Les personnes victimes demeurent plus que jamais au cœur de notre attention. Vos attentes et vos exigences sont légitimes et vraiment entendues. Nous les accueillons comme venant du Seigneur lui-même. C’est tous ensemble, nous en avons conscience, que nous pouvons contribuer à une fidélité renouvelée à l’Évangile. Telle est notre détermination résolue. Telle est notre humble prière.

A Lourdes, le 8 novembre 2022
article du site de la CEF

 

Lire le discours de clôture

 



Lourdes le 7 novembre 2022 : conférence de presse de Mgr Éric de Moulins-Beaufort (président de la CEF)


 

Paris le 21 octobre 2022 : Déclaration de Mgr Eric de Moulins-Beaufort, Président de la Conférence des évêques de France, au sujet de Mgr Michel Santier – Paris le 21 octobre 2022

La révélation dans la presse de faits graves mettant en cause Mgr Michel Santier est un choc pour de nombreux fidèles, en particulier dans les diocèses de Créteil, de Coutances et de Luçon. Je redis ma compassion pour ceux qui ont souffert de ces faits, mais aussi envers toutes celles et tous ceux que ces révélations blessent. Le sentiment de trahison, la tentation de découragement sont autant d’émotions que je comprends et qui nous traversent, tout comme l’incompréhension et la colère de beaucoup devant les actes eux-mêmes. J’entends et je reçois aussi les critiques formulées autour de l’absence de communication des mesures romaines quand elles ont été édictées.

Il ne peut y avoir d’impunité dans l’Église, quelle que soit la fonction de la personne mise en cause. Mgr Michel Santier a été sanctionné par l’autorité du Saint-Siège, après le signalement des faits par l’Archevêque dont il dépendait à l’époque, dès que ce dernier en a eu connaissance. De nouveaux éléments portés à la connaissance de Mgr Dominique Lebrun, archevêque de la province dont dépend désormais Mgr Michel Santier par son lieu de résidence, l’ont amené à informer Rome afin de rouvrir la procédure pour que de nouvelles mesures soient prises en conséquence. Il veille aussi à ce que les autorités civiles soient dûment informées.

J’entends aussi la demande d’une plus grande clarté sur ces procédures canoniques et les mesures qui peuvent en découler. Nous sommes là face à une tension entre les exigences du droit canonique, son usage, ses interprétations qui peuvent varier d’un expert à l’autre, les pratiques de la justice de notre pays, le respect des personnes et l’exigence de transparence que portent beaucoup de fidèles. Nous devons réfléchir à des changements dans nos procédures, dans notre façon de les mener comme d’en communiquer les résultats. Ce sujet important exige une étude sérieuse. Les évêques commenceront à y travailler dès l’assemblée plénière de novembre. Le groupe de travail sur les bonnes pratiques face à des plaintes mis en place après l’assemblée de novembre 2021 aura aussi des recommandations à faire en ce domaine. Nous porterons à Rome le fruit de nos réflexions et nos propositions pour améliorer ce qui peut l’être.

Je redis notre détermination à poursuivre ce chemin de vérité et de justice, pour que la confiance demeure possible et que notre Église soit toujours plus fidèle à sa mission.

+ Éric de Moulins-Beaufort