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« Orientons-nous vers la lumière du Christ Ressuscité ! »

C’est l’appel que je vous adressais dans la Lettre pastorale Dans la joie que donne l’Esprit (§ 28 à 76), précisant que là résidait la condition pour annoncer avec courage et audace le Salut de Dieu à notre monde, et plus particulièrement à cette terre de Loire-Atlantique au service de laquelle le Seigneur nous envoie.
Alors que nous venons d’entrer en carême, cet appel rejoint celui du prophète Joël entendu lors de la célébration des cendres : « Revenez au Seigneur votre Dieu, car il est tendre et miséricordieux, lent à la colère et plein d’amour. » Nous voilà donc invités à profiter de ces 40 jours de préparation à la fête de Pâques pour « revenir au Seigneur notre Dieu » et nous laisser guider par la lumière du Christ-ressuscité, lui qui, par sa mort et sa résurrection, nous a fait entrer dans l’alliance avec Dieu. À la suite des apôtres, il nous a appelés par notre nom pour « être avec lui et nous envoyer prêcher. »1
La seconde partie de la Lettre pastorale déploie ce double appel : comment, en effet, pourrions-nous prêcher l’Évangile si nous ne sommes pas avec le Christ et reliés à lui comme le sarment sur le cep 2 ? Le temps du carême sera alors ce « moment favorable » 3 pour nous laisser illuminer, toucher par la lumière du Christ Ressuscité et être ainsi renouvelés pour la mission.
Dans la Lettre pastorale, je vous partageais un souvenir d’enfance rapporté par Céline Martin (sœur Geneviève au Carmel de Lisieux), la sœur de Sainte-Thérèse de l’Enfant-Jésus 4. Céline, à partir d’un petit fait du quotidien, déploie une parabole qui nous fait découvrir comment et pourquoi il nous faut nourrir et entretenir notre relation à Dieu qui, par le Christ, est venu faire alliance avec nous.
Céline, regardant dans un kaléidoscope tourné vers la lumière du soleil, s’émerveille des « jolis dessins de diverses couleurs variant à l’infini » qui se donnent à voir. Elle veut alors comprendre les secrets d’une telle féérie et décide de le démonter. Tout d’abord, elle ne voit au fond du kaléidoscope que « quelques petits bouts de papiers et de laines jetés ça et là et coupés n’importe comment ». Un peu déçue, elle poursuit sa recherche et découvre alors trois petits miroirs à l’intérieur du tube. Elle conclut : « J’avais la clé du problème. Ce fut pour moi l’image d’un grand mystère. Tant que nos actions, même les plus petites, ne sortent pas du foyer de l’amour, la Sainte Trinité, figurée par les glaces convergentes, leur donne un reflet et une beauté admirables. Oui, tant que l’amour est dans notre cœur, que nous ne nous éloignons pas de son centre, tout est bien (…) »
Quelle belle parabole pour ces jours de carême ! Nous voilà conviés à nous recentrer sur ce « foyer d’amour » qu’est la Trinité afin d’unifier nos vies, de les rendre belles et lumineuses, alors qu’elles sont trop souvent morcelées entre la famille, le travail, les engagements divers… La parabole du kaléidoscope nous rappelle que nos existences trouvent leur cohérence en Dieu trinitaire. Ce « foyer d’amour », qui se manifeste à nous par la Parole méditée et partagée en communauté, la vie fraternelle vécue en Église, la grâce reçue dans les sacrements, le cœur à cœur de la prière personnelle et communautaire… éclaire et réchauffe notre quotidien. Il lui donne sens et nous permet de sentir sa chaleur et sa force au cœur des moments heureux ou difficiles, des choix à poser, dans les épreuves qui touchent nos contemporains proches ou lointains, dans les progrès qui humanisent… Ainsi, de la même manière que ces « quelques petits bouts de papiers et de laines jetés ça et là et coupés n’importe comment » trouvent leur harmonie grâce aux trois miroirs, nos vies ne pourront être disponibles pour la mission que nous confie le Seigneur que si elles peuvent trouver en lui leur unité, leur assurance et leur repos. Ainsi le prophète Jérémie de s’exclamer au nom du Seigneur : « Béni soit l’homme qui met sa foi dans le Seigneur, dont le Seigneur est la confiance. Il sera comme un arbre, planté près des eaux, qui pousse, vers le courant, ses racines. Il ne craint pas quand vient la chaleur : son feuillage reste vert. L’année de la sécheresse, il est sans inquiétude : il ne manque pas de porter du fruit. » 5
Oui, en ce carême 2023, « orientons-nous vers la lumière du Christ ressuscité » ! Bon et saint carême

Mgr Laurent PERCEROU
Évêque de Nantes
paru dans ELA n° 134 – mars 2023


1. (Marc 3, 13-14)
2. (Jean 15, 1-6)
3. (Romains 5, 20-6,2)
4. Mgr Laurent Percerou, Lettre pastorale Dans la joie que donne l’Esprit, § 30
5. (Jérémie 17, 7-8)